ISLE-AUX-COUDRES
CALCAIRES DU BOUT-D'EN-BAS
Calcaires du Bout-d'en-Bas
LOCALISATION
Coordonnées : 47° 25,587′ N, 70° 18,880′ O
À partir de Baie Saint-Paul, via la route 362, prendre la chemin pour Saint-Joseph-de-la-Rive. Prendre le traversier à Saint-Joseph-de-la-Rive pour L’Isle-aux-Coudres. Prendre le chemin des Coudriers vers l’est sur 6,3 km. Tourner à gauche sur le chemin du Bout-d’en-Bas. Le site peut être sous l’eau à marée haute.
Description sommaire du site :
L’Île aux Coudres fait peut-être partie du territoire géographique de Charlevoix, mais au point de vue géologique, l’île appartient à un domaine complètement différent de celui de la rive nord du fleuve. L’île fait partie du domaine géologique des Appalaches. Les Appalaches sont composées essentiellement de roches sédimentaires et volcaniques qui se sont mises en place entre 650 et 440 millions d’années. Puis, il y a environ 400 millions d’années, un astéroïde d’environ deux kilomètres de diamètre est venu frapper la croûte terrestre pour créer un astroblème qui a affecté les formations rocheuses présentes dans la région de Charlevoix, c’est-à-dire la chaîne de montagnes des Laurentides ainsi que les roches de la Plate-forme du Saint-Laurent et probablement une partie des Appalaches. Il est aussi possible que les Appalaches et les sédiments de la Plate-forme du Saint-Laurent aient été encore séparés par une mer à cette époque. Aujourd’hui, une faille importante sépare l’île et la rive nord du Saint-Laurent (figure 1).

Géologie :
Les roches observées à la pointe du Bout d’en Bas sont des roches sédimentaires de granulométries diverses qui, à l’origine, étaient des sables, des boues et des argiles. Ces sédiments se sont probablement mis en place en milieu marin, car dans la roche les grains de sable sont soudés entre eux par du calcaire. Or le calcaire ne se forme généralement qu’en milieu marin. Il y a donc tout lieu de croire que les sédiments à l’origine de ces roches proviennent de l’érosion de roches plus vieilles du côté des Appalaches au sud et du Bouclier canadien au nord et ont été transportés ensuite jusqu’en milieu marin.
Les roches présentent une surface assez particulière qui ressemble à de la peau d’éléphant (figure 2). Cette texture est le résultat de l’intersection de deux plans. Quels sont ces plans?
D’abord, on sait qu’il s’agit d’une roche sédimentaire à cause de sa texture et de sa composition. Les roches sédimentaires sont formées de sédiments qui se déposent en couches successives. Les couches individuelles sont limitées par des surfaces appelées plans de litage marquant une lacune dans le dépôt ou des changements des conditions de dépôt ou encore des changements de composition des sédiments. On peut voir ainsi une succession de lits appelée stratification. Cette stratification peut être plus ou moins marquée, selon les minéraux contenus dans la roche. Dans le cas présent, on sait que la roche contient des minéraux argileux. Or, les minéraux argileux sont souvent en forme de bâtonnets ou de plaquettes, et lorsque ces minéraux se déposent et sont enfouis sous les sédiments subséquents, ils ont tendance à se réorienter à l’horizontale. Cela a pour effet d’accentuer la stratification.
Sur ce site, on peut distinguer des lits justement à cause des lacunes dans les dépôts et aussi des changements minimes de leur composition (figure 2).

Toutefois, ce qui donne à la roche une texture en peau d’éléphant est lié au fait que le litage est recoupé par une autre structure qu’on appelle clivage. Ce clivage est une famille de plans de fracture plus ou moins parallèles selon lesquels la roche se débite. Lorsque la fracturation est intense, ces plans définissent une schistosité. Cette fracturation se développe lorsque la roche est déformée. D’ailleurs, si l’on observe attentivement les roches de l’affleurement, on notera des plis de faible amplitude.
C’est donc l’intersection du litage et du clivage qui donne cet aspect de peau d’éléphant à la roche.
À certains endroits sur l’affleurement, la roche prend l’aspect d’un hérisson de pierre avec des petits pics centimétriques acérés qui pointent vers le haut (figure 3). Ce type de structure est observé généralement dans des terrains calcaires, où la roche contient de la calcite (ou carbonate de calcium). À la pointe du Bout d’en Bas, c’est le ciment des roches, le liant qui tient les grains ensemble, qui est calcaire. On vient de voir que la roche montre des plans de faiblesse : le litage et le clivage. On sait que, avec le temps, le calcaire finit par se dissoudre dans l’eau, surtout si cette eau est le moindrement acide. Cela se produit surtout lorsque ces roches qui ont été longtemps enfouies finissent par arriver près de la surface avec le soulèvement de la croûte terrestre. La roche, surtout dans ses plans de faiblesse, est alors exposée au vent et à la pluie et aussi à l’action des végétaux.
Voici les étapes par lesquelles les roches ont dû passer pour en arriver à la structure hérissée observée :
- soulèvement de la croûte;
- exposition aux intempéries;
- fracturation de la roche (la fracturation peut être ancienne ou était déjà là avant l’exposition aux intempéries) (figure 2);
- pénétration de l’eau dans les fractures (plans de litage et de clivage) et dissolution de la roche dans les surfaces exposées aux fluides;
- formation des pics (figure 3) qui peuvent prendre plusieurs siècles à se développer.
Un terrain qui a subi ce type de transformation s’appelle un karst. C’est le même phénomène qui mène à la formation des cavernes.


À noter que les roches de la pointe du Bout d’en Bas ne semblent pas avoir été affectées par l’impact météoritique. Aucune structure ou brèche d’impact n’a été observée à cet endroit ou ailleurs dans l’île. Pourtant, à moins de 5 km de cet endroit vers le nord, on peut observer des cônes de percussion sur la rive nord du fleuve. Ceci veut probablement dire que les roches de l’île aux Coudres n’étaient pas à cet endroit précis lors de l’impact météoritique. Elles étaient probablement beaucoup plus au sud et elles ont été transportées tout d’un bloc par des mouvements tectoniques lors de la deuxième phase de déformation des Appalaches (figure 5).
